28 sept. 2012

Bercy, septembre 2012


La passerelle Simone de Beauvoir s'avère plus loin que prévu, et les tours de la bibliothèque François Mitterrand semblent s'éloigner au fur et à mesure que j'avance. Du quartier bobo et un peu artificiel de Bercy Village, je suis les quais le long du flot de voitures des voies sur berges. C'est ici que font demi-tour les bateaux-mouches les plus aventureux, après il n'y à plus grand chose à voir. L'endroit est strictement désert, même pas un jogger, j'imagine que c'est plus animé à la pause déjeuner où ces bancs vides accueillent de jeunes cadres attentifs à ne pas se tâcher la cravate avec de la sauce  kebab. Un ascenseur me tend les bras, m'offrant sa course vers une destination inconnue. Je décline poliment...

12.10 Collectif, suite... et fin.

Et voilà, 12.10 Collectif  n'est plus. J'ai reçu la nouvelle par mail hier, abrupte et directe. Et j'ai éclaté de rire. Un rire un peu nerveux, quand même, mais irrépressible. Comment cette aventure pouvait-elle se terminer de meilleure façon que celle-là, tragique et comique à la fois ? Le webmaster s'emmêle les pinceaux, mélange identifiants et mots de passe, et croyant effacer un vieux blog supprime d'un clic le 12.10 tout entier. Une fraction de seconde irrémédiable et sans retour, la technique est impitoyable. Pas de retour en arrière, pas d'annulation possible. On peut y mettre les moyens que l'on veut, se rouler par terre ou implorer Saint-Overblog, près de quatre années de 12.10 sont irrémédiablement parties dans les limbes d'internet...

Une belle bourde en forme d'acte manqué, si on y réfléchit bien. Le 12.10, c'était un peu comme un avion de ligne qui aurait alterné vols de croisières et traversées de turbulences. Des pannes de moteurs parfois, ajoutées à de régulières pannes sèches, ont souvent contraint l'appareil à planer en rase-motte. On s'en est toujours sortis sans trop de casse, le pilote ayant toujours su redresser au bon moment. N'oublions pas non plus les passagers, beaucoup ont eu également leurs heures de bravoure en participant à ces manœuvres de détresse. 

Les plans de vol un peu erratiques des voies que nous avons empruntées nous ont, de temps à autres, interrogés sur la nécessité de poursuivre la navigation. Ranger le coucou au hangar et le laisser pourrir doucement a été plusieurs fois envisagé. Et puis, à chaque fois, l'appel du large a été le plus fort et on est repartis pour un tour. C'est devenu au fil du temps une sorte de "syndrôme douze-dizien", cette incapacité de s'arrêter. Peut-être (sûrement) que la raison tient à cette belle expérience humaine sur laquelle reposait l'édifice, et à ces autres belles expériences humaines qui en ont découlé.

Involontairement, le 12.10 Collectif a trouvé une fin que personne n'avait la force de lui donner. Un sabordage à la fois épique et un peu pathétique, à l'image de la vie. Il en restera quatre années de rencontres et de souvenirs, heureux ou malheureux, légers ou affreusement pesants. Autant d'expériences qui -aussi riches soient-elles- rendent impossible toute reconstruction ou reproduction d'une telle aventure. RIP.

Merci Bruno de t'être inquiété de la situation, je crois que tu es le seul premier à ce jour.